COP 27 : La crise climatique et une année de faim record
Les tempêtes, les sécheresses et les inondations d'une immense ampleur aggravent une crise alimentaire mondiale sans précédent. Partout dans le monde, les effets dévastateurs du changement climatique frappent déjà certaines des personnes les plus pauvres de la planète, qui dépendent de la terre et des conditions météorologiques prévisibles pour leur avenir. Dans le même temps, le Programme alimentaire mondial (PAM) donne aux communautés et aux gouvernements les moyens de se préparer, de réagir et de se rétablir.
Il n'est pas trop tard pour s'attaquer à la crise climatique et à la tempête de la faim qu'elle suscite, mais nous devons agir rapidement.
Inondations
Des inondations record – affectant 33 millions de personnes – ont laissé un tiers du Pakistan sous les eaux en août et septembre, déracinant des communautés, détruisant des routes, des ponts et des moyens de subsistance. Bien qu'il contribue chaque année à moins de 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, le Pakistan se classe parmi les dix pays les plus touchés par le changement climatique. Les inondations ont suivi une forte vague de chaleur - un événement qui se produisait auparavant une fois tous les mille ans - et une sécheresse au cours de laquelle les températures sont restées continuellement au-dessus de 45 °C.
Le PAM aide le gouvernement à atteindre 2,7 millions de personnes parmi les plus vulnérables avec de la nourriture, de la nutrition et des actions de relance. À l'avenir, la priorité du PAM sera de continuer à aider le peuple pakistanais à restaurer ses moyens de subsistance et à renforcer sa résilience à long terme afin de protéger les petits exploitants agricoles et les systèmes alimentaires du pays.
Ces dernières semaines, le Népal a également été frappé par de fortes pluies, des crues soudaines meurtrières et des glissements de terrain. "Avec des prévisions fiables, il est de plus en plus possible d'anticiper les phénomènes météorologiques extrêmes et de prendre les mesures nécessaires à l'avance", déclare Robert Kasca, représentant et directeur pays du PAM au Népal. "Le PAM a soutenu les autorités népalaises en envoyant une aide en espèces et des messages d'alerte précoce aux communautés à risque."
Pendant ce temps, des inondations meurtrières ont balayé l'Afrique de l'Ouest et du Centre, affectant 5 millions de personnes dans 19 pays et aggravant une crise alimentaire déjà alarmante. Le PAM aide à renforcer les capacités régionales pour faire face aux extrêmes climatiques, en aidant les gouvernements et les communautés à éviter ou à atténuer leurs impacts - par exemple par le biais de messages d'alerte précoce ou de techniques agricoles telles que le captage d'eau dans le sol, les "demi-lunes," pour aider à restaurer les terres dégradées.
Dans les pays d'Afrique de l'Ouest que sont la Mauritanie, le Mali et le Burkina Faso, le PAM a également distribué 9,4 millions de dollars provenant de l'assurance climatique de l'Union africaine, pour aider les communautés à se remettre de la sécheresse paralysante de 2021.
"L'année dernière, ma récolte a échoué à cause de la sécheresse", explique Karim Sore, un agriculteur de la région Centre-Nord du Burkina Faso. "Mais grâce au versement de l'assurance climatique [du PAM], j'ai pu payer les frais de scolarité de mes enfants et répondre aux autres besoins fondamentaux de ma famille."
Des pluies torrentielles et des inondations généralisées ont frappé le Yémen déchiré par le conflit cette année, endommageant les infrastructures et les habitations, et laissant 73 0000 personnes dans le besoin de nourriture et d'autres secours d'urgence.
Les chocs climatiques aggravent les conditions de faim déjà désastreuses du pays, avec plus de 20 millions de Yéménites ayant besoin d'une aide humanitaire. Mais la pénurie d'eau pourrait être le plus gros problème à long terme du Yémen. Certains experts prédisent que le pays pourrait manquer d'eau au cours des prochaines décennies - et que le changement climatique ainsi que la destruction massive de l'environnement menacent d'exacerber les tensions existantes dans le pays.
Parallèlement à l'aide alimentaire vitale, le PAM travaille avec les communautés locales pour renforcer leur résilience face aux ravages des conditions météorologiques extrêmes - comme un mur de protection contre les inondations dans le village oriental d'Al-Ghorafi. "Nous avions l'habitude de passer des nuits éveillés par peur des inondations", explique Saeed, père de 10 enfants qui a participé au projet. "Le mur protégera le village et les monuments qui s'y trouvent."
Sécheresses
L'un des pays les plus vulnérables au climat au monde, la Somalie a vu tripler les phénomènes météorologiques extrêmes au cours des 30 dernières années, selon les experts. Aujourd'hui, la sécheresse la plus longue depuis quatre décennies, combinée au contrecoup de la crise alimentaire mondiale, laisse quelque 6,7 millions de personnes confrontées à une faim sévère - et plus de 300 000 à des niveaux de faim catastrophiques, à moins que l'aide humanitaire ne soit considérablement augmentée.
Malgré les problèmes de financement et de sécurité, le PAM a considérablement intensifié ses opérations en Somalie, atteignant un nombre record de personnes bénéficiant d'un soutien alimentaire et nutritionnel - dont environ 4,6 millions de personnes pour le seul mois de septembre. Au-delà des secours immédiats, le PAM investit dans le renforcement des capacités des institutions gouvernementales et donne aux Somaliens les outils nécessaires pour devenir plus résistants aux chocs et moins dépendants de l'aide humanitaire.
"En Somalie, nous avons déclenché ce que nous appelons une 'action d'anticipation' à court terme, dans les zones les plus durement touchées par la sécheresse", explique Gernot Laganda, qui dirige les programmes de réduction des risques climatiques et de catastrophe au PAM. "Cela signifie que nous n'attendons pas qu'il y ait une saison ratée. Nous travaillons avec des prévisions – et si elles franchissent un certain seuil, nous apportons une aide avant que les dégâts ne se produisent."
Dans la ville de Dolow, dans le sud de la Somalie, près de la frontière éthiopienne, Muhuba Hassan Warsame, 35 ans, a bénéficié d'un programme de résilience du PAM qui lui a donné une parcelle de terrain et des ressources pour planter un potager. "J'ai acquis des compétences grâce à ce projet sur la façon de cultiver la ferme, et comment planter et stocker les récoltes", explique Muhuba. "Je vais mieux depuis que ma vie a changé."
Faisant partie du couloir sec d'Amérique centrale, le Guatemala est un autre point chaud climatique au monde, avec plusieurs crises qui s'y croisent. Une récente étude conjointe du PAM et du groupe de recherche CGIAR révèle que les fluctuations climatiques - des longues périodes de sécheresse aux fortes pluies intempestives - aggravent la faim, la pauvreté et les inégalités dans la région, exacerbant les conflits. En effet depuis 2009 le Guatemala a connu une diminution stupéfiante de 44 % des précipitations.
Le PAM aide des centaines de milliers de personnes vulnérables dans les pays du corridor sec à s'adapter au changement climatique, par le biais de projets qui créent des actifs, renforcent les moyens de subsistance et réhabilitent et reboisent les terres dégradées et marginales.
"Nous semons de la coriandre, des oignons, des chipilines, des solanacées, des chayotes, des courges, du manioc et d'autres petites choses", explique Damaris Reyes, 32 ans, chef d'un groupement agricole féminin qui cultive des cultures résistantes à la sécheresse et fabrique des pesticides organiques avec le soutien du PAM dans le département de Chiquimula, à l'est du Guatemala. "Avec ces légumes dans nos parcelles, nous économisons environ 700 quetzales (ou 88 USD) par semaine, car le coût des légumes est actuellement assez élevé."
Tempêtes
Les Philippines sont frappées par une moyenne de 20 tempêtes et typhons chaque année. Le changement climatique devrait rendre ces événements extrêmes plus destructeurs et imprévisibles. En décembre dernier, le pays a connu le troisième typhon le plus puissant à avoir jamais touché terre dans l'hémisphère nord. Le typhon Rai a touché plus de 12 millions de personnes, tuant des centaines de personnes et laissant des milliers de sans-abri du jour au lendemain. En collaboration avec les autorités et ses partenaires, le PAM a apporté une aide alimentaire aux communautés vulnérables et les a aidées à se reconstruire et à se redresser durablement.
Au cours de l'année écoulée, par exemple, quelque 80 000 personnes ont bénéficié des projets de rétablissement du PAM suite au typhon Rai - du nettoyage des zones côtières jonchées de débris à la réparation des routes endommagées, en passant par la restauration des mangroves (principales barrières anti-tempête et atténuateurs du climat) et l'organisation de jardins communautaires. "Les communautés sont devenues si propres et vertes et, plus important encore, les personnes qui reçoivent l'aide du PAM tiennent à maintenir ces améliorations et à lancer des nettoyages réguliers dirigés par la communauté", déclare Alice Follosco du PAM, qui a aidé à soutenir notre réponse au typhon.
Une série de facteurs - de la pauvreté et de la déforestation à l'exposition aux tremblements de terre et aux événements météorologiques extrêmes - fait d'Haïti l'un des pays les plus vulnérables au climat d'Amérique latine et des Caraïbes. Les retombées de ces multiples dangers alimentent un mélange toxique de criminalité, de pauvreté et de prix élevés qui ont provoqué une faim catastrophique.
Malgré des conditions de fonctionnement extrêmement difficiles, le PAM travaille avec les autorités et les communautés haïtiennes pour lutter contre le changement climatique à travers des projets tels que la gestion des bassins versants, la réhabilitation des infrastructures et la préparation aux situations d'urgence. Dans la commune septentrionale de Limbe, par exemple, Dozimène, 60 ans, mère de six enfants, gagnait 70 dollars par mois pour sa participation à un programme du PAM de réhabilitation des canaux d'irrigation et des routes touchés par les inondations.
"Ces travaux ont vraiment changé ma vie et celle de mes enfants", déclare Dozimène, qui a utilisé l'argent pour la nourriture et le transport, avant d'investir le reste dans une petite entreprise vendant des détergents au marché.