Et si les canons se taisaient ? Comment la paix pourrait transformer l'avenir des pays
Que se passerait-il si les fusils se taisaient et si la violence s'arrêtait soudainement ?
À l'occasion de la Journée internationale de la paix, nous avons posé cette question aux directeurs pays du PAM en Ukraine, en Haïti et en République démocratique du Congo - trois pays où les troubles ont aggravé la faim et brisé des vies et des avenirs.
Voici leurs réflexions sur les retombées de la paix.
UKRAINE : Matthew Hollingworth, directeur pays du PAM
La dévastation causée par 19 mois de guerre en Ukraine est indescriptible.
Des millions de personnes ont dû quitter leurs maisons, leurs emplois et leurs fermes. Des villes et des villages entiers ont été rasés, et des kilomètres et des kilomètres de terres fertiles ont été ravagés et minés. Des femmes et des hommes innocents sont régulièrement tués ou blessés alors qu'ils font leurs courses ou collectent de l'aide humanitaire.
Imagine life without the threat of air strikes. Children learning in schools without the constant disruption of air-raid alarms. Imagine shopping for food without risking your life. Imagine farming your land without the fear of stepping on a mine.
La paix, en fin de compte, est la seule issue. Mais en attendant la paix, nous continuerons à soutenir les familles ukrainiennes aussi longtemps que possible.
HAITI : Jean-Martin Bauer, directeur-pays du PAM
J'imagine un sourire contagieux si la paix revient en Haïti.
Les Haïtiens sont profondément attachés à leur famille. Avec la paix, ceux qui sont séparés par la violence se réuniraient à nouveau. Ils commenceraient courageusement à reconstruire les maisons pillées et détruites. Tout le monde travaillera ensemble.
Alors que 4,35 millions d'Haïtiens souffrent d'insécurité alimentaire, les agriculteurs des zones rurales qui ont fui leurs terres à cause des gangs reviendront sur leurs terres. Ils cultiveront avec enthousiasme tout ce qui peut être récolté, le plus rapidement possible. Ils distribueront leur production aux habitants des centres urbains appauvris, comme Cité Soleil dans la capitale Port-au-Prince.
Les routes bloquées seront rouvertes et les produits circuleront librement. Le riz cultivé en grande partie dans le département de l'Artibonite (nord-ouest), les noix de cajou du département du Nord et le poisson des zones côtières seraient vendus dans tout le pays.
Tous les enfants retourneraient à l'école. Les filles, qui sont aujourd'hui gardées à la maison pour leur sécurité, seraient libres de retourner en classe. Les garçons ne seraient plus attirés par la vie facile dans la rue. Les gangsters ne seraient plus considérés comme des modèles dans la communauté.
Je verrais les yeux pétillants des madan sara, les vendeuses de rue, qui se lèvent à l'aube. Elles s'asseyaient sur des camions remplis de denrées alimentaires, chantant le rythme de la vie. Ces dames du marché, qui travaillent dur, fournissent de la nourriture au pays et gagnent de l'argent pour envoyer leurs enfants à l'école.
Lorsque des visiteurs arriveraient sur nos côtes, l'accueil chaleureux caractéristique des Haïtiens retentirait à nouveau. La vie prendrait un nouveau départ.
RDC : Peter Musoko, directeur pays du PAM
La paix dans l'Est de la République démocratique du Congo permettra aux gens de rentrer chez eux. Les Congolais méritent la paix : le droit de cultiver la terre, le droit pour les enfants d'aller à l'école en toute sécurité et le droit pour les mères de gagner leur vie sans craindre la violence.
Le conflit en cours dans l'Est de la RDC a arraché 5,6 millions de personnes à leur foyer. Il s'agit d'un pays exceptionnellement riche en ressources naturelles et en potentiel humain, qui joue un rôle essentiel dans la réalisation des objectifs mondiaux en matière de changement climatique et de transition énergétique. Malgré cela, de nombreux Congolais sont laissés pour compte, en particulier les jeunes.
J'ai récemment rencontré Merveille Batumike, étudiante en économie du développement, qui m'a fait part de sa vision d'un avenir sans violence.
"J'espère qu'un jour, nous pourrons vivre en paix comme les autres pays", m'a-t-elle dit. "Nous pourrons dormir sans crainte et nous ne nous réveillerons pas le matin en espérant simplement survivre à la journée.
"Nous sommes tous confrontés à l'insécurité, que ce soit dans le village ou même dans la ville", a-t-elle ajouté. "S'il y a la paix, je pense que tout ira mieux parce qu'il y a certaines activités que nous ne pouvons tout simplement pas faire à cause des troubles.
Je lance un appel à la communauté internationale : n'oubliez pas l'Est de la RDC. L'ampleur des souffrances est immense et va bien au-delà de ce que les humanitaires peuvent faire à eux seuls. Les Congolais méritent non seulement une vie sans violence, mais aussi une vie sans faim - pour leurs enfants et eux-mêmes.
Mais aujourd'hui, le financement est loin de répondre aux besoins les plus fondamentaux en matière de survie, ce qui réduit à néant les fragiles progrès réalisés par le PAM et d'autres humanitaires. Il peut également contribuer à alimenter une situation explosive et dangereuse qui met tout le monde en danger, en particulier les femmes et les enfants. Elle compromet en outre la sécurité et l'avenir même des Congolais, qui vivent déjà au bord du précipice.