Skip to main content

Une odyssée Centrafricaine sur la compagnie aérienne du dernier recours

L'assistant en Communication du Programme Alimentaire Mondial des Nations Unies (PAM), Bruno Djoyo, raconte un jour à bord du service aérien administré par le PAM, qui a transporté environ 20 000 passagers vers 30 destinations à travers la RCA en 2017.
, par Bruno Djoyo

Au cœur d'une République Centrafricaine (RCA) déchirée par le conflit de plus en plus croissant, le Service aérien humanitaire des Nations Unies (UNHAS) demeure l'ultime recours fiable permettant d'atteindre des dizaines de milliers de personnes affamées. 

1*ZKs4nBQ6Uc5aeKk-6k17DQ.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

 

1*g2BLUBNy1OyM_q8t-xVsbw.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

06H20 du matin — Le soleil se lève sur l'aéroport de Bangui de M'poko, où l'agent du mouvement aérien du PAM, Gratien Kasongo, accueille avec un sourire les passagers qui somnolent encore. La plupart sont des travailleurs humanitaires, qui se préparent à aller vers certains points chauds de la RCA. Je les rejoins au comptoir où ils présentent leurs documents de voyage et pèsent leurs sacs, avant de se diriger vers la salle d'embarquement où certains passagers profitent pour prendre du café ou regarder leurs emails.

1*REx6-2jhLZO5xU-TY9I9rw.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo
1*5-E93hagJheAWOvqzfsN0A.jpeg
Jonathan Léa, pilote de UNHAS. Photo: PAM/Bruno Djoyo

08H00 — Enfin, nous sommes à bord du ET 410 ZS-ATC. "Pas de cigarettes, ni de bagarre à bord", prévient le pilote Philippe Kanau. Les passagers rient puis Kanau et le copilote Jonathan Léa mettent en marche les moteurs. Trois minutes plus tard, nous dépassons la capitale. Notre voyage a débuté.

1*gcB29OL61bN6YpbRTK8KsQ.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo
1*NSsIJzHfdShs9WBu-ifQxg.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

10H30 — Premier arrêt: Bangassou, à 730 km à l'est de Bangui. Autrefois connue pour sa production locale d'huile de palme et l'extraction du diamant, Bangassou est aujourd'hui une ville fantôme. Les combats de la milice ont transformé de nombreuses maisons et la mosquée principale en décombres et ont tué et blessé des dizaines de personnes. Plusieurs milliers d'autres ont traversé la rivière Mbomou pour chercher refuge dans la République démocratique du Congo, à seulement quelques kilomètres.

1*J_ilhIosDp8JKVjcTlZkdQ.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

« Tous les musulmans de Bangassou se sont réfugiés dans le petit séminaire, mais la vie est difficile pour les musulmans et les chrétiens", explique Monseigneur Honoré Zonon, vicaire général de Bangassou, qui est mon compagnon de siège durant cette première étape. « Avec les mauvaises routes et l'insécurité, l'UNHAS est le seul moyen pour les travailleurs humanitaires d'atteindre les gens ».

1*bYF_3qd3xRVtkYtk0Yccpw.jpeg
Monseigneur Honoré Zonon. Photo: PAM/Bruno Djoyo

La tension est visible sur les visages des passagers qui sortent sur la petite piste d'atterrissage de Bangassou gardée par les forces de maintien de la paix de l'ONU. Notre Pilote Kanau tente de détendre l'atmosphère. « Vous pouvez prendre du café ou des pizzas au duty-free » plaisante-t-il.

1*43RolV-_gP9SH5l3K6ojMg.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

11H25Obo, notre prochain arrêt, se trouve à 25 minutes de vol et à 1230 km à l'est de la capitale. Monseigneur Zonon nous a quitté à Bangassou, mais trois nouveaux passagers ont embarqué. Obo est parmi les rares villes épargnées par le conflit intercommunautaire qui en a fracturé beaucoup d'autres, mais il demeure un endroit dangereux. Depuis juin, les combattants de l'Armée de résistance du Seigneur de l'Ouganda (LRA) ont augmenté leurs attaques et la population locale dépend pour sa sécurité de la mission de la paix des Nations Unies. Lorsque nous traversons les forêts épaisses et les prairies qui jalonnent le paysage pendant le court voyage jusqu'à Obo, Aubin Kotto-Kpenze qui dirige une ONG travaillant pour le compte des victimes de la LRA, s'exclame : « Comment peut-il y avoir un tel conflit inutile dans un si beau pays? »

1*9_-iBZ1TvA80WZBoTsubPQ.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

11H50 — Environ 100 personnes sont rassemblées à la piste d'atterrissage d'Obo pour nous saluer. L'ophtalmologue Carmen Peua Aranda, de l'ONG espagnole AIDEVARAN compte parmi les passagers qui débarquent. Après Obo, elle visitera une autre ville frappée par le conflit, Zémio, où des milliers de personnes ont également été déplacées. Une fois encore, elle s'y rendra avec UNHAS. "C'est le seul moyen sûr pour nous d'atteindre ces endroits", dit-elle.

1*WeP7P14qCegkSlyfcttfyg.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo
1*vvp0wz9a2z5Rd9eNphR7Yw.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

Le temps étant menaçant, nous quittons Obo rapidement. Notre prochain arrêt, la ville de Rafaï située au sud-est, a également été victime des attaques de la LRA. Quand nous débarquons à Rafaï une heure plus tard, il y a un petit groupe de personnes qui est venu accueillir le président de l'ONG Aubin. Deux autres passagers grimpent à bord.

1*MMpplJ7Seezj99tJLbjeNg.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo

13H27 — Au moment où nous quittions Rafaï, quelques gouttes de pluie commencent à tomber. Durant le trajet jusqu'à Bangui, j'ai le privilège de prendre en plein ciel des photos de la cabine de pilotage. Pendant que je prends les photos, le temps d'un éclair, j'ai voulu aussi être pilote. A mes yeux, le ciel semblait beaucoup plus beau et bleu dans les airs qu'au sol. Et pendant un bref moment, je me suis aussi rappelé de ma conversation avec Philippe pour qui « La mission de l'UNHAS en RCA est vraiment noble » et qu'il est tellement fier « de soutenir l'effort humanitaire ».

16H30 : après une courte escale à Bangassou, nous sommes finalement sur le point de débarquer à Bangui. J'entends presque les soupirs de soulagement des passagers alors que nous revenons vers la sécurité relative de la capitale. Le voyage de plus de huit heures m'a épuisé mais je suis heureux d'avoir fait ce long périple, tellement riche en rencontres et en émotions. Avant de descendre de l'avion, je tiens à saluer Philippe et Jonathan, les pilotes de UNHAS qui accomplissent leur mission avec tant de conviction et de passion.

1*noDdEYoDBY3wDo2CWOh0zA.jpeg
Photo: PAM/Bruno Djoyo
1*zBOguILmr7dqSvJn97Oy_Q.jpeg
Philippe Kanau, pilote de UNHAS. Photo: PAM/Bruno Djoyo