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RD Congo : comment la maison d'hôtes du PAM exploite l'énergie verte

Alors que la région du Kasaï, dans le centre-sud de la République démocratique du Congo, sort d'un conflit dévastateur, un projet du Programme alimentaire mondial offre l'espoir d'un changement plus large dans l'une des zones les plus exposées à l'insécurité alimentaire du pays.
, Elizabeth Bryant
A landscape shot of a blue and white building.
La nouvelle maison d'hôtes du PAM, financée par la Suède, Dag Hammarskjöld à Kananga, porte le nom du secrétaire général suédois des Nations Unies décédé lors d'une mission de paix en RDC il y a 60 ans. Photo : PAM/@Castofas

Au petit matin, la lumière du soleil scintille sur les 136 panneaux solaires étendus sur la toiture du bâtiment le plus récent de Kananga, tandis que les voitures klaxonnent et qu'un homme pousse une brouette dans la rue poussiéreuse en contrebas.

Financée en grande partie par la Suède et inaugurée en octobre dans la vaste capitale de la province du Kasaï-Central en République Démocratique du Congo, la maison d'hôtes humanitaire du Programme alimentaire mondial (PAM) est un exploit d'ingénierie verte qui pourrait servir de modèle pour des initiatives similaires ailleurs. 

Aujourd'hui, alors que la région du Kasaï, dans le centre-sud du pays, sort lentement d'un conflit particulièrement violent en 2016-17, qui a déplacé 1,4 million de personnes, laissé des champs en jachère et fait régner la faim, la maison d'hôtes incarne également de plus grands espoirs : que le PAM et ses partenaires puissent passer d'une réponse de crise à court terme à un soutien au gouvernement pour créer une province dynamique et prospère.  

A woman bending down to inspect crops in a field.
Une agricultrice travaille dans son champ à l'extérieur de Kananga. Avec une paix fragile dans les Kasaïs, le PAM et ses partenaires espèrent accélérer les projets de résilience dans la région. PAM/@Castofas
Women carry products on their head while walking on dirt roads.
Les infrastructures délabrées de la région de Kananga a réduit le commerce et accru la pauvreté. PAM/ Elizabeth Bryant

En effet, soulignant la stabilité fragile qui s'installe, les casques bleus de la  MONUSCO ont quitté la province en juin. 

Mis à part les conflits, les chocs climatiques, l'augmentation des ravageurs des cultures, les retombées de plusieurs épidémies d'Ebola et l'impact économique de la COVID-19 ont tous contribué à réduire la production alimentaire et à aggraver la faim et la pauvreté en RDC ces dernières années. Le pays abrite le plus grand nombre de personnes déplacées en Afrique – 5,5 millions de personnes – ainsi qu'un demi-million de réfugiés de pays voisins.

"Le travail que nous avons accompli jusqu'à présent ici a contribué à sauver des vies", déclare le représentant et directeur du PAM en RDC, Peter Musoko, qui a assisté à l'inauguration de la maison d'hôtes en compagnie de dignitaires locaux et de l'ambassadeur de Suède en RDC, Henric Rasbrant.

"Maintenant, nous devons passer au travail visant à changer les vies", ajoute M. Musoko. "Ce bâtiment représente la manière dont nous allons avancer - en travaillant ensemble."  

Accueillant le personnel du PAM ainsi que d'autres travailleurs humanitaires, la maison d'hôtes est située sur un terrain donné par le gouvernement local. Sa construction et son entretien ont généré des emplois et stimulé l'économie de la région.

Les panneaux solaires étincelants qui surmontent le bâtiment bleu et blanc offrent un autre atout important : l'énergie renouvelable dans une région en proie aux pannes d'électricité. 

Conçu et installé en partenariat avec une entreprise basée à Goma, dans l'est de la RDC, le système d'énergie solaire offre le double avantage d'investir localement et de minimiser l'empreinte carbone lié à sa fabrication et son installation. Le système de 90 kVA alimente non seulement la maison d'hôtes de 12 pièces, équipée d'une cuisine, de douches et d'une petite salle de sport, mais fournit également une batterie de secours 24 heures sur 24. 

"C'est la première fois que nous réalisons ce type de projet à une telle échelle en RDC", déclare Callan Murray Hocking, chef de l'ingénierie du PAM en RDC. "C'est un bon exemple de ce qui peut être réalisé en collaborant avec le secteur privé, dans la lutte contre le changement climatique."

A aerial shot of a building.
Vue aérienne de la maison d'hôtes de Kananga avec panneaux solaires. Photo : PAM/@Castofas

"Le système solaire du PAM à Kananga est probablement l'un des meilleurs que j'ai vus dans le monde", déclare Martin Sjoholm, de l'agence suédoise de contingence civile, MSB, qui a géré la construction globale de la maison d'hôtes. "Si nous pouvons copier-coller cette solution pour l'adapter à n'importe quel projet de construction, elle pourrait devenir un standard."

Trouver des solutions durables au problème de la faim dans la région des trois provinces du Kasaï pourrait s'avérer plus difficile.

Les plans à plus long terme du PAM comprennent la collaboration avec les partenaires et le gouvernement pour étendre considérablement son programme d'alimentation scolaire, un outil efficace pour lutter contre la faim des enfants et augmenter la fréquentation scolaire. Autre priorité du PAM : s'associer à l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et à d'autres organismes pour mettre en œuvre des projets de renforcement de la résilience ciblant les petits exploitants agricoles et les communautés rurales. 

People using a dirt road.
Le personnel du PAM et les véhicules sous contrat sont confrontés à de sérieux obstacles pour acheminer de la nourriture aux personnes vulnérables. Photo : PAM/Elizabeth Bryant

Ces initiatives visent à aider à renverser les statistiques alarmantes de la faim dans les Kasaïs - même pour la RDC, considérée comme la plus grande crise de la faim au monde, avec 27 millions de personnes en situation d'insécurité alimentaire aiguë, dont 6,1 millions au bord de la famine (phase 4 ou phase d'urgence du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire - IPC).

Plus de la moitié de la population des Kasaïs est confrontée à des niveaux de faim qui frisent la crise ou au-delà. Dans la seule province du Kasaï-Central, près de la moitié des enfants de moins de cinq ans souffrent d'un retard de croissance dû à la malnutrition.  

Combattre la faim

Dans un centre de santé situé à quelques kilomètres de la nouvelle maison d'hôtes, Solange Malu berce son bébé Jean, pendant qu'elle regarde une infirmière enrouler un ruban autour de son bras maigre pour mesurer son périmètre brachial. Il a huit mois, mais la malnutrition sévère lui fait paraître la moitié de son âge.

"Je ne savais pas qu'il était malade jusqu'à ce que l’infirmier me le dise", dit-elle

Épouse d'un creuseur artisanal de diamants de la province voisine du Kasaï, Malu n'est arrivée que récemment à Kananga, après être elle-même tombée malade. Elle est hébergée par sa famille et reçoit un traitement nutritionnel dans ce centre de santé soutenu par le PAM et dirigé par des missionnaires carmélites.

"Je n'avais aucun moyen de payer les frais de santé chez moi", dit-elle, "c’est pourquoi je suis venue ici". 

A woman holds a baby while a healthcare worker checks them.
Un agent de santé vérifie la malnutrition chez le fils de Solange, Jean. Les taux de malnutrition dans l'ensemble de la région du Kasaï sont supérieurs à la moyenne nationale. Photo : PAM/@Castofas

“Malnutrition in this area is not just because of poverty,” says Jules Mukengela, a WFP nutrition officer covering the Kasai-Central region. He lists a raft of other reasons, including early marriages that leave young mothers unequipped to properly care for their infants. “It’s also because of lack of knowledge about what a healthy diet consists of.” 

"La malnutrition dans cette région n'est pas seulement due à la pauvreté", déclare Jules Mukengela, un responsable de la nutrition du PAM qui couvre la région du Kasaï-Central. Il énumère une série d'autres raisons, notamment les mariages précoces qui font que les jeunes mères ne sont pas en mesure de s'occuper correctement de leurs enfants. "C'est aussi à cause du manque de connaissances sur ce qu'est une alimentation saine".

Pour modifier les régimes alimentaires, il est également essentiel de stimuler l'agriculture, qui reste la principale source de nourriture et de revenus de la région. Elle a été touchée par le conflit. Parallèlement, le délabrement des réseaux routiers et ferroviaires de la RDC a limité les exportations et la croissance, et a fait grimper les prix des denrées alimentaires importées. 

"Je dois cultiver davantage pour nourrir ma famille", déclare Joseph Kalonzo, agriculteur et père de six enfants, qui cultive des pistaches, des arachides et du maïs en haut d'une route venteuse et endommagée par des cratères à l'extérieur de Kananga. "Nous avons la paix, mais nous avons besoin de plus de soutien pour mieux travailler". 

Les préoccupations de Kalonzo laissent penser que la maison d'hôtes de Kananga sera très sollicitée dans un avenir proche. Mais Peter Musoko du PAM, attend le jour où ce ne sera plus le cas.

"Si nous réussissons, dans quelques années, la population du Kasaï n'aura plus besoin de l'assistance du PAM pour avancer", déclare Musoko. "Tout comme la MONUSCO s’est retirée en juin, la meilleure chose qui puisse arriver est de voir le PAM quitter la région du Kasaï à son tour." 

Le PAM prévoit d'atteindre 8,7 millions de personnes en RDC cette année avec une aide alimentaire, nutritionnelle et en espèces, soit près de 2 millions de plus que l'année dernière, malgré un environnement opérationnel extrêmement difficile. L'organisation a besoin de 99 millions de dollars jusqu'en avril 2022 pour atteindre tous ceux en RDC qui ont le plus besoin de notre soutien.

 

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