Quatre femmes font voler l’hélicoptère humanitaire du PAM en Haïti, allons à leur rencontre…
Ces opérations aériennes permettent au personnel et au fret humanitaires essentiels d'atteindre des destinations éloignées dans tout le pays.
Traduit de l'anglais
Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies gère le Service aérien d'aide humanitaire des Nations Unies (UNHAS) en Haïti. Au cours de l'année qui a suivi le déploiement par l'organisation d'un hélicoptère MI-8 AMT au service de l'ensemble de la communauté humanitaire en Haïti, 3 000 travailleurs humanitaires et 60 tonnes de fret de 69 organisations différentes ont été transportés. Du personnel médical et de première ligne, des médicaments et du matériel hospitalier ont ainsi été acheminés vers des zones difficiles à atteindre.
Dans le bureau du PAM, quatre femmes travaillent en continu pour maintenir l'hélicoptère humanitaire dans les airs chaque jour. Isabel, Jovanie, Robine et Danourah gèrent tous les aspects de l'opération aérienne, des réservations à la programmation en passant par les autorisations de vol, les demandes de fret de dernière minute, la sécurité et le suivi de la maintenance et de la rotation des équipages.
Isabel Ruiz-Zaera, Chef d'aviation
« Enfant, j'avais l'habitude de m'allonger sur notre balcon où je passais des heures à compter les avions qui passaient au-dessus de ma tête », raconte Isabel.
La Barcelonaise n'a jamais envisagé évoluer dans un domaine autre que celui de l'aviation. Après avoir obtenu sa licence de pilote à 18 ans, elle s'est rapidement lancée dans une carrière qui l'a menée dans les airs de la Côte d'Ivoire, de l'Afghanistan, de l'Italie, du Mali, du Niger et maintenant d'Haïti.
« Enfant, j'avais l'habitude de m'allonger sur notre balcon où je passais des heures à compter les avions qui passaient au-dessus de ma tête. »
Isabel a rejoint le PAM en 2017 après plusieurs missions au sein du Département des opérations de maintien de la paix (DPO) des Nations Unies.
« J'ai toujours eu besoin de sensations fortes dans mon travail », dit-elle. « Dans l'aviation, chaque jour est un défi, et il faut sortir des sentiers battus pour répondre à des demandes qui semblent impossibles à première vue ». C'est ainsi qu'elle a récemment trouvé une solution pour faire transporter par avion une machine radiologique à La Gonave, une île isolée au large des côtes d'Haïti où les infrastructures médicales sont particulièrement limitées. « C'est tellement gratifiant de lire les nombreux e-mails de remerciement du responsable de l'organisation médicale que nous desservons. Un simple vol change la vie d'une communauté. C'est ce qui me motive à me lever tous les matins », dit-elle.
Lorsqu'on l'interroge sur son frère, professeur d'histoire à Barcelone, Isabel se met à épeler son nom en alphabet militaire : « LIMA, UNIFORME… » — dit-elle, surprise.
« Je veux dire L, U, I, S. Luis. Il s'appelle Luis. »
Jovanie Laguerre, Officier d'aviation
« Ma première fois dans un hélicoptère était en 2006. Je n'avais pas peur », se souvient Jovanie.
Les avions ne sont pas rares à Jérémie, au sud d'Haïti, où Jovanie a grandi. Mais après avoir étudié l'administration des affaires et la technologie industrielle, elle s'est retrouvée dans l'aviation par hasard. Lorsque la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) a commencé son mandat en 2004, Jovanie a postulé pour un emploi et a été affectée à un poste d'assistante d'inspection et de contrôle de la qualité. Elle y a acquis les compétences qui par la suite lui ont permis de décrocher un poste dans l'équipe d'aviation.
« Je ne savais même pas que le PAM avait des hélicoptères. »
Le dernier de ses 15 ans d'expérience dans l'aviation est au sein du PAM, où elle s'occupe des réservations, des horaires et de la maintenance.
« Je ne savais même pas que le PAM avait des hélicoptères », dit-elle. « Je croyais qu'ils ne faisaient que donner de la nourriture ! »
Robine Jean-Baptiste, Assistante de vol
« Mon oncle était dans l'aviation, ma mère travaillait pour Air France », se souvient Robine. « C'est une affaire de famille », dit-elle.
Et pourtant, Robine a fait des études de droit. « Je devais terminer mon diplôme de droit cette année, mais il a été suspendu à cause du Covid-19 », dit-elle. Elle a donc postulé pour un emploi au PAM et s'est rapidement retrouvée embarquée sur l'hélicoptère de l'UNHAS. « Les paysages m'ont fait oublier la peur », admet-elle.
En tant qu'assistante de vol, Robine, 25 ans, aide à organiser et à surveiller les vols et accompagne les passagers et le fret à bord. Elle a maintenant décidé de rester dans l'aviation et la logistique. « Chaque vol est aussi passionnant que le premier. Faire voler du matériel aux premiers intervenants et emmener le personnel humanitaire sur le terrain en situation d'urgence est infiniment enrichissant », dit-elle.
« Les paysages m'ont fait oublier la peur. »
Danourah Bien-Aimé, Assistante de vol
« Privyet, kak dela ? » (Bonjour, comment allez-vous ?) dit Danourah aux pilotes russes chaque matin lorsqu'elle monte à bord de l'hélicoptère du PAM. Avant de rejoindre le PAM, cette Haïtienne de 26 ans n'aurait jamais pensé parler un seul mot de russe — encore moins dans le ciel des Caraïbes. Mais aujourd'hui, elle le parle en qualité d'assistante de vol pour l'UNHAS.
Danourah ne se voyait pas évoluer dans le milieu humanitaire. Le 10 janvier 2010, sa vie a été bouleversée par le tremblement de terre qui a ravagé Haïti et qui a changé à jamais le destin de son pays en tuant plus de 200 000 personnes et en laissant des millions de personnes blessés et déplacées.
« J'étais à l'école avec ma petite sœur et je sortais tout juste d'un cours d'éducation physique quand le sol a commencé à trembler. Nous sommes sorties en courant juste avant que le bâtiment ne s'effondre, mais ce n'est que lorsque j'ai vu la poussière et entendu les cris de tout le quartier que j'ai compris à quel point c'était grave », se souvient-elle.
Le père de Danourah, qui travaillait à l'époque pour la MINUSTAH, l'a emmenée faire un tour en ville le lendemain dans sa voiture. « Nous entendions des cris et des gémissements monter de la ville chaque nuit pendant des semaines, voire des mois », dit-elle.
Quelques semaines après le tremblement de terre, Danourah s'est donc inscrite comme bénévole dans un orphelinat pour s'occuper des enfants rescapés. C'est cette introduction au travail social qui l'a conduite dans le monde de l'humanitaire. Elle est désormais embarquée sur un hélicoptère de l'ONU, dix ans après que son père ait volé dans l'un d'eux pour la MINUSTAH.
Ce n'est donc pas une coïncidence si le nom de famille de Danourah est « Bien-Aimé ».
Le PAM remercie l'Allemagne, le Canada, l'Espagne, la France, la Suisse, l'Union européenne (ECHO) et l'USAID pour leur soutien généreux et constant aux services logistiques communs en Haïti, notamment au Service UNHAS. Pour poursuivre ses opérations en Haïti seulement, l'UNHAS a urgemment besoin de 700 000 dollars. Pour maintenir le service à travers le monde en 2021, 4,4 millions de dollars seront nécessaires.