Au centre du Mali, une nouvelle vie se forme pour les cœurs brisés
Les conflits et chocs climatiques accrus dans le centre du Sahel, une région d'Afrique comprenant le Burkina Faso, le Mali et le Niger, ont entrainé, depuis début 2019 une augmentation rapide des déplacements internes, la perturbation des marchés et des difficultés d'accès aux services sociaux de base avec un impact négatif sur les moyens d'existence, la sécurité alimentaire et les conditions de vie de plus de 2,4 millions de personnes.
A Mopti, épicentre de la crise au Mali, je suis allée à la rencontre des familles déplacées qui tentent de reconstituer une nouvelle vie avec l'aide du Programme alimentaire mondial (PAM) et ses partenaires.
Il est 10H00 à Socoura, un quartier de Sévaré, principale ville de la Région de Mopti au centre du Mali. L'école primaire de la place, habituellement bondée d'élèves, est plongée dans un silence inhabituel. Les salles de classe se sont transformées en dortoirs abritant une centaine de personnes, hommes, femmes et surtout des enfants, forcées de fuir leurs villages laissant tout derrière eux pour sauver leurs vies.
« Tout a commencé il y a trois mois. Des coups de feu, des machettes et surtout beaucoup de sang versé. J'ai perdu mon mari et mes deux fils lors d'une attaque contre mon village. J'ai été obligée de fuir à pied avec les deux derniers qui ont survécu » raconte Kadidia Barry, la quarantaine à peine entamée, qui vit désormais ici avec ses deux enfants rescapés et une vingtaine d'autre personnes dans une salle de classe de l'école primaire.
« Nous sommes passés par différents villages. Je comptais sur la charité des habitants pour pouvoir nourrir mes enfants une fois par jour. Finalement, nous avons croisé d'autres déplacés qui venaient à Sévaré et nous les avons suivis. C'est ainsi que nous nous sommes retrouvés ici » ajoute-t-elle d'une voix empreinte de tristesse et de désolation.
« Dès notre arrivée, le PAM nous a fourni cette carte qui me permet de faire des achats pour nourrir ma famille » m'explique-t-elle en se dirigeant vers une boutique, munie de sa carte de ration.
« En général je prends du riz, du lait, des œufs et des pâtes. Je cuisine dans la matinée pendant que mes enfants sont à l'école. L'UNICEF a mis en place une école dans le camp de déplacés qui est à une ruelle d'ici. Les enfants étudient là-bas. Nous déjeunons ensemble aux alentours de midi » m'explique Kadidia.
A la question de savoir qui paie pour cette nourriture, je lui explique que le PAM bénéficie d'un appui financier de plusieurs donateurs, y compris des hommes et femmes de bonnes volontés qui, même si elle ne les connait pas, se préoccupent d'elle et de ses enfants.
À ces mots, elle déclare « Mon cœur est toujours meurtri ; face à la barbarie humaine, j'avais perdu foi en l'humanité. Mais savoir que quelque part dans le monde, des gens pensent à nous aider sans toutefois nous connaître, me réconforte. Dites-leur merci de ma part ».
C'est avec le cœur lourd et plein d'émotions que je quitte Kadidia et sa famille qui espèrent retrouver une vie normale où les enfants pourront réaliser leurs rêves.
« Un jour, si Dieu le veut, nous retournerons au village, peut être mon fils ou ma fille sera docteur ou enseignant pour donner en retour à d'autres » conclut-elle.
Au Mali, les interventions d'urgence du PAM sont rendues possibles grâce aux contributions des donateurs comme l'Allemagne, la Belgique, le Canada, le Danemark, les États-Unis, la France, le Mali, la Norvège, le Japon, le Luxembourg, le Royaume-Unis,la Suisse, l'Union Européenne (ECHO), la Suède.