Aider à contenir une épidémie d’Ebola en République démocratique du Congo
par Jacques David, traduit de l'anglais
Au cours de la dernière épidémie en République démocratique du Congo (RDC), plus de 1 350 personnes avaient contracté le virus Ebola, et plus de 870 d'entre eux sont morts. Neuf mois après qu'on réponse ait été mise en place, l'épidémie est toujours contenue dans les provinces de l'Ituri et du Nord-Kivu. Il y a cependant un risque élevé qu'elle se propage à de grandes villes comme Goma, ou plus loin.
Rechercher les personnes qui pourraient avoir contracté le virus et limiter leurs déplacements est alors un moyen d'éviter qu'une telle épidémie ne se reproduise. Ainsi, le PAM distribue des colis alimentaires hebdomadaires aux personnes soupçonnées d'être porteuses d'Ebola, afin qu'elles n'aient pas à quitter leur domicile pour acheter de la nourriture pendant qu'elles sont sous observation médicale. En effet, plus les cas suspects restent au même endroit, moins le virus risque de se propager.
Depuis août 2018, dans le cadre d'une stratégie d'intervention intégrée menée par les gouvernements, le PAM a aidé 264 000 personnes en leur fournissant 3 300 tonnes d'aide alimentaire et nutritionnelle.
Kahindo Anastasie a été identifiée comme un cas suspect par la Commission de contrôle après avoir rendu visite à sa tante, qui avait contracté le virus. Elle est donc devenue une " personne de contact". Une situation qui lui a fait d'abord fait peur. Nous l'avons rencontré lors d'une distribution de vivres effectuée par le PAM et son partenaire d'exécution Caritas, la troisième pour Kahindo Anastasie. « En tant que personne de contact, je dois rester à la maison pendant trois semaines, soit le temps nécessaire pour vérifier si j'ai été contaminé ou non. La nourriture sert de compensation, à défaut de ne pas pouvoir travailler dans les champs », dit-elle.
« En tant qu'infirmière, je ne peux pas abandonner les gens qui viennent à l'hôpital. »
L'assistance du PAM soutient également le personnel médical qui, malgré les risques, est resté dévoué à ses patients : « En tant qu'infirmière, je ne peux pas abandonner les gens qui viennent à l'hôpital. J'ai dû traiter des personnes dont le statut Ebola n'a été confirmé qu'à un stade ultérieur. Heureusement, j'avais déjà été vaccinée et j'étais donc confiante lorsque j'ai été choisie comme contact. C'est comme ça que j'ai commencé à avoir cette nourriture. Même si je ne peux pas travailler pour le moment, j'ai de quoi me nourrir ainsi que ma famille tous les jours maintenant », nous explique Jolie Kauwaro, 35 ans.
Comme dans le cas de Kahindo Anastasie et Jolie Kauwaro, la recherche et la surveillance des personnes ayant été en contact avec des victimes d'Ebola est cruciale pour enrayer la transmission du virus. Les distributions hebdomadaires de nourriture font partie intégrante de cette stratégie d'intervention, car elles encouragent les contacts à se faire connaître, et à s'enregistrer comme porteurs potentiels du virus Ebola nécessitant des soins médicaux.
« Dans ma région, les contacts potentiels d'Ebola sont venus spontanément à la Commission de suivi parce qu'ils avaient entendu dire qu'il y avait des distributions alimentaires spécifiques pour eux. Le bouche à oreille fonctionne bien dans ce genre de situation. Finalement, c'est l'ensemble du processus de réponse à Ebola qui bénéficie de ces distributions », explique le docteur Belinda Ayumuna, de la Commission de suivi de la zone sanitaire de Sayo.
« Quand les gens reçoivent de la nourriture régulièrement, ils sont plus disposés à coopérer et à s'engager. »
Dans certaines régions, les équipes d'intervention médicale se sont efforcées de gagner la confiance et la coopération des communautés locales ; une population qui s'était sentie abandonnée pendant des années de conflit. L'aide alimentaire du PAM encourage les communautés à recevoir davantage de soins médicaux.
« Lorsque les gens reçoivent régulièrement de la nourriture, ils sont plus disposés à coopérer et à s'engager dans le processus de vaccination. Le suivi médical pendant les distributions crée également un climat de confiance et de crédibilité », ajoute le docteur Ayumuna.
En plus d'aider les personnes de contact, le PAM distribue également des colis alimentaires et nutritionnels aux patients atteints d'Ebola en traitement et en convalescence, ainsi qu'aux survivants. Cela permet de faciliter leur réadaptation physique et leur réinsertion dans la communauté.
« De nombreux patients atteints d'Ebola souffrent d'anorexie et perdent jusqu'à 10 kg à cause des vomissements, de la diarrhée et d'une forte fièvre. Sans la nourriture spécialisée qui leur est distribuée par le PAM, le processus de guérison et de convalescence serait plus lent, et l'issue plus incertaine. L'aide alimentaire contribue à améliorer l'état des patients, qui restent physiquement instables pendant des mois après leur rétablissement », explique le docteur Maurice Mutsunga, président du comité des patients guéris d'Ebola.
Le Dr Mutsunga a contracté le virus Ebola à l'hôpital où il travaillait et l'a transmis à sa femme. Heureusement, ils ont tous les deux survécu. Il travaille actuellement au Centre de traitement Ebola de Beni, où il surveille les enfants de patients soupçonnés et confirmés d'être atteints d'Ebola. En tant que patient guéri, il est maintenant immunisé.
« J'ai lutté et souffert à cause d'Ebola, personne ne devrait vivre ça. Je veux donc continuer à me battre contre cette maladie qui a tué si rapidement un grand nombre d'entre nous. C'est mon devoir », conclut-il.
« Le PAM continue de jouer un rôle crucial dans la réponse face à Ebola, son aide alimentaire en est un élément stratégique. Des donateurs comme le Canada, les Opérations européennes de protection civile et d'aide humanitaire (ECHO) et l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) jouent un rôle crucial dans ce soutien. Il est primordial que tous les donateurs continuent à financer la réponse mise en place afin d'éviter que l'épidémie ne se propage davantage, y compris dans les pays voisins », déclare Claude Jibidar, directeur de pays du PAM en RDC.
La pression est forte pour gagner la course contre la montre et sauver des vies. La dixième épidémie d'Ebola en RDC devrait durer jusqu'en 2019, dépassant ainsi la durée des précédentes épidémies dans le pays.
En savoir plus sur le travail du PAM en RDC