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5 choses à savoir sur l’insécurité croissante au Sahel

L'escalade des violences affecte les communautés et les efforts humanitaires au Burkina Faso, au Mali et au Niger
, WFP (PAM)

Dans les pays du Sahel central (Burkina Faso, Mali et Niger), les conflits et la violence exacerbent les effets du changement climatique sur la sécurité alimentaire des populations. Le Programme alimentaire mondial (PAM) apporte une aide alimentaire vitale à 1,4 million de personnes dans ces trois pays, où 950 000 d'entres elles ont été déplacées par les conflits. Le PAM prévoit d'étendre ses opérations pour venir en aide à 4,8 millions de personnes d'ici décembre. Vous aussi, vous pouvez aider dès maintenant et faire un don.

Par George Fominyen, traduit de l'anglais

Au cours des derniers mois, les organisations humanitaires ont mis en garde à plusieurs reprises la communauté internationale contre la détérioration de la sécurité dans les trois pays du Sahel central que sont le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Mais que cela signifie-t-il réellement pour ceux qui sont sur le terrain, qu'il s'agisse des civils ou du personnel humanitaire ? Nous avons posé la question à Caroline Bantchev, Analyste de la sécurité qui conseille la direction du PAM et le personnel de terrain dans la région. Voici cinq choses que nous avons apprises :

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Encerclés par les conflits et la peur, une génération entière d'enfants du Burkina Faso, du Mali et du Niger pourrait grandir en pensant que la violence est la réponse. Photo : PAM/Marwa Awad

1. Pas un jour ne passe sans entendre parler d'un attentat

La prolifération des groupes armés non étatiques, les actions anti-insurrectionnelles menées par les forces de l'État et les partenaires internationaux, ainsi que la création de groupes d'autodéfense armés au niveau des villages (notamment dans le centre du Mali et au Burkina Faso) ont créé un cercle vicieux de conflits dans lequel est plongée la plus grande partie de la région du Sahel. La violence a son épicentre dans la zone dite des trois frontières entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger, et se propage rapidement. Les tensions ethniques existantes ont été exacerbées par l'insécurité croissante.

« En réalité, il ne se passe pas un jour sans qu'une attaque contre un poste de sécurité soit signalée », déclare M. Bantchev. « La nature des attaques a évolué. Auparavant, il s'agissait de quelques hommes qui s'en prenaient à une armée ou à un poste de gendarmerie isolé, puis ils battaient en retraite. Mais ces derniers mois, nous avons assisté à des attaques très coordonnées qui ont fait de nombreuses victimes au sein des forces de sécurité. La dernière grande attaque sur la frontière entre le Mali et le Niger, en janvier seulement, a fait au moins 89 morts parmi les soldats nigériens ».

Selon des témoignages, lors d'une attaque typique, des groupes prendraient d'assaut une base militaire sous différents angles, avec des files de motos et de camionnettes transportant des centaines de personnes armées. Mais les groupes armés ont commencé à utiliser des voitures piégées pour faire exploser l'entrée d'une base militaire. Cela crée le chaos et permet à des hommes armés d'entrer dans les lieux. Les groupes imposent également des taxes aux villageois.

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Les civils, de plus en plus attaqués, sont obligés de fuir et dépendent de l'aide humanitaire lorsqu'elle est disponible. Photo : PAM/Simon Pierre Diouf

2. Les civils pris pour cible

Dans les trois pays, les forces de sécurité étaient jusqu'à présent la principale cible des attaques. Cependant, à mesure que le conflit évolue, notamment avec l'implication des milices locales et la violence inter-communautaire visant délibérément des ethnies et des groupes spécifiques, le nombre de victimes civiles augmente radicalement.

« Les civils ont d'abord été des « dommages collatéraux », c'est-à-dire qu'ils se trouvaient au mauvais endroit au mauvais moment, lors d'une attaque contre les forces de sécurité ou d'une opération anti-insurrectionnelle », explique l'analyste. « Mais de plus en plus, nous voyons des civils être pris pour cibles, intimidés, harcelés ou tués, par des acteurs du conflit qui les accusent de se ranger du côté opposé ».

Au Burkina Faso, des assassinats visant les communautés religieuses ont eu lieu, avec notamment des attaques contre les églises mais aussi contre les clercs jugés insuffisamment radicaux. Les groupes armés s'en prennent également aux représentants de l'État ainsi qu'aux chefs locaux. Cela se produit principalement car les groupes armés veulent attiser les tensions entre les communautés, poursuivant leur programme de déstabilisation pour projeter l'image d'un gouvernement faible, incapable d'assurer la sécurité.

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Pour le moment, 950 000 personnes ont été déplacées à cause des violences au Burkina Faso, au Mali et au Niger. Photo : PAM/Simon Pierre Diouf

Le nombre d'enlèvements est également en hausse. Si certains ont ciblé des Occidentaux, ce sont surtout des habitants de la région qui sont kidnappés pour obtenir une rançon ou comme forme d'intimidation. Les enlèvements de nombreux chefs de village locaux dans l'ouest du Niger sont considérés comme un moyen de susciter la peur et d'empêcher la population de protester ou de chercher de l'aide contre les groupes armés. Les otages ont été soit libérés une fois la rançon payée, soit tués.

3. Plus aucune confiance entre voisins

L'insécurité s'est rapidement traduite par une peur quotidienne. Les gens vivent dans l'appréhension constante qu'un groupe armé puisse attaquer leur village et tuer leurs enfants. Les rumeurs concernant des attaques potentielles, réelles ou simulées dans des communautés éloignées se répandent très vite.

« Les gens ne savent pas à qui faire confiance. Ils ne savent pas qui croire », raconte l'analyse C. Bantchev. « Ceux qui étaient en bons termes avec leurs voisins sont maintenant effrayés, les gens se montrent du doigt. Ce cycle de haine qui s'est propagé est probablement l'une des caractéristiques les plus dangereuses de la tragédie qui se déroule au Sahel ».

4. Désertification des villages

Les villages des zones touchées par la violence se vident : plus de 950 000 personnes sont aujourd'hui déplacées à l'intérieur du Burkina Faso, du Mali et du Niger. Elles ont quitté leurs champs et dépendent désormais soit de l'aide des communautés d'accueil (qui sont elles-mêmes démunies) soit de l'assistance gouvernementale et humanitaire, lorsqu'elle est disponible. Les enseignants ont été intimidés et menacés à plusieurs reprises, ce qui en a forcé beaucoup d'entre eux à fuir. Les écoles ont quant à elles fermé : au Burkina Faso, 2 000 écoles ont été fermées, perturbant ainsi l'éducation de plus de 300 000 enfants.

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La violence oblige de plus en plus de personnes à quitter leurs champs, ce qui compromet les progrès en matière de développement. Photo : PAM/Marwa Awad

5. Un sort tout aussi fatal pour ceux qui ne fuient pas

Les personnes qui restent sur place, souvent les plus vulnérables comme les personnes âgées ou les familles avec de jeunes enfants, sont confrontées à un contexte difficile. Elles sont souvent coupées de toute aide en raison des difficultés d'accès pour les organisations humanitaires. Ces personnes sont soumises à des taxes et à des extorsions de fonds de la part des groupes armés et des milices. Lors des opérations anti-insurrectionnelles, elles sont souvent soupçonnées de fréquenter les groupes armés.

Les mesures de sécurité telles que l'interdiction de l'utilisation des motos dans certaines régions du Burkina Faso, du Mali et du Niger rendent la vie encore plus difficile à la population locale. « Les motos sont utilisées par les groupes armés, mais elles sont aussi le principal moyen de transport des villageois pour se rendre sur les marchés, dans les fermes ou les hôpitaux », ajoute Caroline Bantchev.

Au-delà de ces problèmes quotidiens, le risque d'être témoin de violences en grandissant suscite de graves inquiétudes chez les jeunes générations du Sahel. C. Bantchev met en garde : « Un jeune garçon ou une jeune fille pour qui la violence fait partie du quotidien risque de croire que son destin ne peut qu'être déterminé dans la violence. »

En savoir plus sur les activités du PAM au Sahel central