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« Nous voulons rester en vie » : l'histoire d'une mère sur la crise humanitaire qui se déroule en Éthiopie

Dans la région nord du Tigré, Aster et son mari comptent sur le soutien du Programme alimentaire mondial pour survivre - avec le risque de famine imminent pour quelque 350 000 personnes, le PAM lance un appel de fonds pour venir en aide à 2,1 millions de personnes
, par Claire Nevill
Aster and her husband Tesfay and three of their children sit together outside a one-roomed shelter where they are living temporarily since their home was set ablaze. Photo: WFP/Claire Nevill
Aster, son mari, Tesfay, avec trois de leurs enfants à l'extérieur de l'abri, une pièce unique dans lequel ils vivent depuis que leur maison à Adi Millen, dans le Tigré, a été incendiée en mai. Photo: PAM/Claire Nevill

Il était 9 heures du matin un samedi de la fin mars, lorsqu'Aster, une maman de sept enfants, détourne le regard de sa cuisinière vers la chambre qu'elle partageait avec son mari et découvre avec horreur qu'elle est en train de prendre feu.

Elle ne se souvient plus de grand-chose après cela, à part la fumée qui s'échappait de sa maison qu'elle occupait depuis 18 ans.

Comme toute mère, la première pensée d'Aster a été pour ses enfants.

"Je leur ai dit de courir", dit-elle. "Nous l'avons tous fait en même temps. Et en regardant en arrière, je ne pouvais pas en croire mes yeux. Notre maison brûlait jusqu'au sol.

Trois des enfants ont couru jusqu'à Shire, à environ 50 km, pour se mettre en sécurité. Aster ne les a pas revus depuis.

Aster and her husband Tesfay stand in the remains of their home which was set ablaze. Photo: WFP/Claire Nevill
'Nous avions quatre pièces dans notre maison, mais maintenant il ne nous reste que les cendres', explique Aster. Photo: PAM/Claire Nevill

Lorsque je la rencontre deux mois plus tard, Aster est assise sur un énorme morceau de décombres au milieu des tas de cendres noires de jais - tout ce qui reste de sa maison. "Après avoir fui, j'ai fait des cauchemars sur ma maison et j'avais des flashbacks de [comment c'était] avant qu'elle ne soit brûlée", dit-elle.

Une cuillère à café scintillant au soleil est tout ce qui reste des biens de la famille et un cruel rappel de tout ce qu'ils ont perdu ce jour-là. Leur maison et leurs récoltes ont pris feu, du bétail et des chèvres ont été pillés.

Aster and her husband Tesfay and two of their sons stand together in what remains of their home which was burned down. Four of their children escaped during the fire and they haven’t seen them since.  Photo: WFP/Claire Nevill
La famille n'a pas encore eu de nouvelles de leurs trois enfants qui ont réussi à s'enfuir. Photo: PAM/Claire Nevill

"J'ai peur et je suis remplie de tristesse parce que mes enfants ne sont pas avec moi", dit-elle. "Ils sont sur la route depuis si longtemps, ils peuvent être n'importe où. Je ne sais pas comment ils vont".

Avant que le conflit actuel ne commence en novembre, la vie dans le village d'Adi Millen, en haut des collines, était très différente, dit-elle.

"Nous étions riches, avec assez de nourriture pour s'alimenter et en vendre au marché, nous avions quatre pièces dans notre maison, mais maintenant il ne nous reste que les cendres. Nous ne pouvons plus dormir comme avant. Et puis il y a la peur persistante qu'« ils » reviennent à tout moment.

Community members embrace at the first WFP food distribution in Adi Millen, a rural village in northwestern Tigray. Photo: WFP/Claire Nevill
La première distribution alimentaire du PAM est arrivée à Adi Millen, en mai. Photo: PAM/Claire Nevill

Adi Millen est situé au sommet de l'une des mille collines qui sillonnent la zone nord-ouest du Tigré, la province du nord de l'Éthiopie.

Habituellement, à cette période de l'année dans cette région d'agriculteurs, où les gens dépendent des cultures de teff, de sésame, de blé et de mil pour se nourrir, le meher - la saison des semis de mai à septembre - bat son plein.

Aster's family share enjoy a dish of injera with spices, a local favourite, which was made using wheat provided by WFP. Photo: WFP/Claire Nevill
La famille d'Aster partage un plat d'injera aux épices préparé avec le blé fourni par le PAM. Photo: PAM/Claire Nevill

Les champs de mil et de teff d'Aster ont été détruits par l'incendie et, comme elle et son mari n'ont actuellement aucun moyen de gagner leur vie, ils ne peuvent plus acheter de semences ou d'engrais pour replanter des cultures. D'innombrables personnes sont confrontées à une situation similaire ou sont tout simplement trop terrifiés pour aller aux champs en raison du risque d'être attaqué et tué.

Alors qu'il devient de plus en plus clair que cette saison agricole est perdue, une tragédie guette des millions de Tigréens.

Ce sont les familles comme celle d'Aster, nichées dans les zones rurales du nord, du centre et de l'ouest de la région, qui sont les plus menacées par la famine. Le Programme alimentaire mondial (PAM) est arrivé juste à temps le mois dernier et a conduit quatre camions de blé, d'huile et de légumineuses sur la colline pour soutenir 4 500 personnes à Adi Millen pour le mois suivant.

Local community members and WFP personnel unload bags of wheat from a truck to those in need in the town of Adi Millen in Tigray. Photo: WFP/Claire Nevill
Les membres de la communauté déchargent la première distribution de nourriture du PAM. Photo: PAM/Claire Nevill

Alors que les volontaires jetaient des sacs de 50 kg de nourriture à l'arrière des camions, le village était plein de vie - la nourriture était chargée sur des ânes, des chameaux et des charrettes ; des femmes bavardant sous des parasols et des foulards colorés ; des hommes se tenant fermement la main et des voisins réunis dans un espace sûr.

"Jusqu'à présent, j'ai compté sur le peu de nourriture que je pouvais obtenir de mes voisins", explique Aster. "Au moins, maintenant, nous sommes soulagés de la faim dont nous souffrons". Elle ajoute : "Je suis heureuse que le PAM ait pu nous apporter la nourriture ici à Adi Millen, où nous sommes loin et coupés de nombreuses villes et marchés".

Families receiving food from a WFP distribution site in the rural village of Adi Millen use pack animals such as camels to transport the food home. Photo: WFP/Claire Nevill
Les animaux de bât tels que les chameaux et les ânes sont utilisés par les habitants d'Adi Millen pour transporter la nourriture reçue du PAM. Photo: PAM/Claire Nevill

Elle et deux de ses fils aînés empruntent l'âne et la charrette d'un voisin pour la journée. Chargé de cinq sacs de nourriture du PAM, il serpente jusqu'au sommet de la colline.

Selon les derniers chiffres, le risque de famine augmentera à moins que l'aide alimentaire et les moyens de subsistance ne soient intensifiées, que les humanitaires aient pleinement accès à toutes les zones et, surtout, que les hostilités cessent. Au total, 350 000 personnes dans la région du Tigré sont au niveau 5 ou au niveau de « catastrophe » du Cadre Intégré de classification de la sécurité alimentaire.

Aster and her husband Tesfay and two of their sons walk back to a temporary shelter where they have been staying since their home was set ablaze. Photo: WFP/Claire Nevill
Aster, son mari Tesfay et deux de leurs fils rentrent à pied dans un abri temporaire où ils vivent depuis que leur maison a été incendiée. Photo: PAM/Claire Nevill

Même avant le conflit actuel, certaines parties du Tigré étaient au bord de la famine, avec 1,6 million de personnes dépendant déjà de l'aide alimentaire, malgré l'énorme potentiel agricole de la région. Les chocs climatiques fréquents, les criquets pèlerins et la montée de l'inflation mettaient déjà à rude épreuve la plupart des familles.

Puis le conflit est arrivé, en pleine saison des récoltes, anéantissant l'emploi et les revenus, et perturbant les marchés et l'accès à l'argent et au carburant.

Le PAM a déployé plus de 180 employés et a rapidement monté son opération d'aide alimentaire d'urgence au Tigré, distribuant du blé, des pois cassés et de l'huile végétale à 1,4 million de personnes et distribuant 355 000 rations nutritionnelles d'urgence aux enfants et aux femmes. Cependant, l'organisation est encore loin d'atteindre son objectif de 2,1 millions. Le temps presse et un accès humanitaire complet et sans entrave pour le PAM et ses partenaires est essentiel en ce moment - car au moment où la famine sera déclarée, il sera trop tard.

Aster, who lost her home, crops and livestock in the conflict is relieved to be receiving WFP food for the first time. Photo; WFP/Claire Nevill
Aster, qui a perdu sa maison, ses récoltes et son bétail dans le conflit, est soulagée de recevoir pour la première fois des vivres du PAM. Photo: PAM/Claire Nevill

Aster attend désespérément de revoir ses trois enfants. Son mari et ses fils ont commencé à ramasser le nécessaire pour reconstruire leur maison et toute la famille espère que la paix mettra fin à leurs nuits blanches. Jusque-là, Aster dit: "Nous devons rester en vie. C'est tout pour le moment."

Le PAM remercie le Canada, l'Allemagne, le Japon, la République de Corée, le Luxembourg, la Norvège, le Royaume-Uni et les États-Unis d'avoir financé la réponse immédiate. L'organisation a besoin de 203 millions de dollars US supplémentaires pour répondre aux besoins nutritionnels d'au moins 2,1 millions de personnes qui en ont désespérément besoin.

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