Le PAM dans l’urgence pour prépositionner des vivres à l'Est du Tchad, alors que le déficit de financement et l'imminence des pluies menacent l'aide aux réfugiés soudanais
N'DJAMENA - Le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM) alerte aujourd'hui sur l’interruption dans quelques semaines de ses programmes humanitaires au Tchad faute de financement. Ce cri d’alarme intervient alors que des milliers de réfugiés soudanais continuent de franchir la frontière du Darfour et que la saison des pluies menace de couper l'accès routier aux livraisons humanitaires dans les camps de l'Est du pays, où près d'un million de réfugiés soudanais ont trouvé asile.
En raison des contraintes financières, l'aide du PAM en faveur de 1,2 million de réfugiés soudanais et de personnes touchées par la crise, notamment les nouveaux réfugiés en provenance du Soudan, sera suspendue en avril. Par ailleurs, la route transfrontalière d'approvisionnement en produits de première nécessité vers le Darfour - la seule fiable vers l'ouest du Soudan, en proie au conflit - est également menacée. Cet accès a permis au PAM de fournir une assistance à un million de personnes au Darfour depuis le mois d'août, et l'organisation prévoit d'augmenter son aide pour atteindre un million de personnes par mois.
Le PAM déploie des efforts considérables pour acheter, transporter et prépositionner suffisamment de stocks de nourriture dans l'Est du Tchad afin d'approvisionner à la fois sa réponse aux réfugiés et ses opérations transfrontalières au Darfour pendant la saison des pluies, au cours de laquelle les routes deviendront impraticables formant des rivières de boue jonchées de camions échoués. Cependant, sans un financement suffisant, ces opérations s'avèrent impossibles.
"Nous sommes engagés dans une course contre la montre. La petite fenêtre permettant de prépositionner des vivres se refermera rapidement et nos ressources s’amenuisent en cette période dramatique. Nous avons déjà réduit nos opérations dans des proportions qui auraient été impensables il y a seulement quelques années, plongeant des personnes affamées dans une situation beaucoup plus critique", a déclaré Pierre Honnorat, représentant et directeur pays du PAM au Tchad.
Au Tchad, le PAM est confronté à une crise financière sans précédent et a déjà procédé à des coupes budgétaires. Depuis que le conflit au Soudan a éclaté l'année dernière, le financement irrégulier a forcé le PAM à se concentrer sur les besoins immédiats, déployant ses efforts sur les nouveaux réfugiés soudanais. En avril, le PAM sera contraint de supprimer toute assistance aux nouvelles vagues de réfugiés soudanais. Depuis des mois, la majorité des réfugiés en provenance du Cameroun, de la République centrafricaine et du Nigeria n'ont reçu aucune aide en raison du manque de fonds. La réduction des rations attise la concurrence entre les réfugiés, les rapatriés et les communautés d'accueil autour des ressources déjà limitées, semant ainsi les germes de tension et d'instabilité.
"Le débordement de la crise soudanaise est en train de submerger la réponse humanitaire au Tchad, déjà sous-financée et surchargée. Nous avons besoin des donateurs pour éviter que la situation ne devienne une catastrophe totale", a alerté M. Honnorat.
Dix mois après l'éclatement du violent conflit au Soudan, plus de 559 000 réfugiés soudanais et 150 000 rapatriés tchadiens sont entrés au Tchad, qui accueille désormais plus d'un million de réfugiés, soit l'une des populations de réfugiés les plus importantes et à la croissance la plus rapide d'Afrique.
Le Tchad est également confronté à sa cinquième année consécutive de crise alimentaire, avec une faim aiguë record qui devrait toucher 2,9 millions de personnes pendant la période de soudure de juin à août, coïncidant avec la saison des pluies. En février, le gouvernement a déclaré un état d'urgence alimentaire et nutritionnelle, soulignant ainsi la gravité de la crise.
La majorité des réfugiés franchissent la frontière portant le fardeau des traumatismes, de la faim et des horribles récits de violence. Ils dépendent entièrement de l'aide humanitaire pour survivre. Les évaluations du PAM montrent que la consommation alimentaire est préoccupante ou à la limite de l'acceptable pour 90 % des nouveaux réfugiés, 77 % des réfugiés préexistants et 67 % des communautés locales dans l'Est du pays. La situation nutritionnelle est particulièrement préoccupante : 40 % des enfants réfugiés soudanais de moins de cinq ans souffrent d'anémie grave.
"Il est impensable de réduire le soutien aux communautés confrontées à un tel niveau de vulnérabilité. Nous forçons les familles à sauter des repas et à manger des aliments moins nutritifs, préparant ainsi le terrain pour des crises nutritionnelles, des crises d'instabilité et des crises de déplacement", a averti M. Honnorat.
Pour assurer un soutien continu aux personnes touchées par la crise au Tchad au cours des six prochains mois, le PAM a besoin d'urgence de 242 millions de dollars.
Note aux rédacteurs :
Des vidéos de haute définition seront disponibles dans les jours à venir - contactez Jonathan.Dumont@wfp.org
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