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Déclaration conjointe sur le Darfour

Ces deux dernières années, grâce à l’action des organisations humanitaires, des centaines de milliers de vies de civils, pris dans le conflit du Darfour, ont pu être épargnées.

Pendant cette période, le taux de mortalité est descendu en dessous du seuil d’urgence, le nombre de personnes touchées par la malnutrition a été divisé par deux par rapport au chiffre de l’été 2004, au plus fort de la crise, et près des trois quarts des habitants du Darfour ont aujourd’hui accès à l’eau potable. Rien qu’en 2006, 400 000 tonnes de nourriture ont été distribuées. Malgré l’augmentation de l’insécurité et du danger pour les habitants et les travailleurs humanitaires, l’ONU et ses partenaires humanitaires ont réussi à assurer la protection et la survie de millions de personnes.

Difficultés à atteindre la population

Cela ne sera bientôt plus vrai. Depuis avril 2004, il n’a jamais été plus difficile d’atteindre la population démunie du Darfour qu’en décembre 2006. Les attaques armées à répétition, les frontières en perpétuel changement et le fractionnement des groupes armés compromettent le travail des organismes humanitaires et condamnent encore plus les civils qui ont déjà payé le plus lourd tribut à ce conflit qui se prolonge. Au cours des six derniers mois seulement, plus de 250 000 personnes ont été déplacées à cause des combats : pour beaucoup d’entre elles c’était la deuxième, voire la troisième fois qu’elles fuyaient. Les villages ont été brûlés, pillés et bombardés au hasard, les cultures et les élevages, détruits. Le nombre de femmes victimes de violences sexuelles augmente à un rythme inquiétant.

Violences envers les travailleurs humanitaires

Nous ne pouvons pas accepter cette situation. De même que nous ne pouvons pas accepter que les travailleurs humanitaires soient de plus de plus la cible de violences. Douze travailleurs humanitaires ont été tués ces six derniers mois, soit plus que ces deux dernières années. Leur mort a des conséquences directes sur les opérations humanitaires au Darfour. En juillet 2006, les travaux pour l’accès à l’eau et l’assainissement dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur de la région ont été temporairement stoppés par l’assassinat de trois ingénieurs en hydraulique qui travaillaient pour le gouvernement. En novembre 2006, neuf employés gouvernementaux ont été enlevés dans le Sud Darfour et cinq n’ont toujours pas été libérés.

Depuis juillet 2006, trente bases d’ ONG et des Nations Unies ont été directement visées par des attaques de groupes armés. Plus de quatre cents travailleurs humanitaires ont dû effectuer trente et un déplacements successifs à travers les trois États qui composent le Darfour, en se retirant des capitales El Fasher et Al Geneina, ainsi que des zones contrôlées par les rebelles. Le matériel a été pillé et les équipes sur place ont été menacées et agressées. A Gereida (Sud Darfour), six bases humanitaires ont été attaquées le 18 décembre, obligeant les ONG à évacuer leur personnel, compromettant sérieusement l’acheminement de l’aide alimentaire et médicale et de l’eau potable vers le le plus gros groupe de déplacés à l’intérieur du Darfour, composé de 130 000 personnes. Dix jours plus tôt, quatre ONGs et le Programme Alimentaire Mondial (PAM) ont dû évacuer leur personnel de Koutoum (Nord Darfour) à E Fasher, après l’attaque de leur base humanitaire, clairement signalée comme telle. Ce ne sont que deux exemples parmi d’autres des incidents qui ont lieu au Darfour.

Restriction des activités

Si cela continue, les opérations humanitaires ainsi que les populations à qui elles sont destinées seront irrévocablement menacées. L’insécurité croissante empêche les habitants du Darfour d’avoir accès à l’aide médicale. En effet, plusieurs ONG assurant des soins d’urgence ont dû suspendre ou restreindre leurs activités, ce qui se traduit par une dégradation de l’hygiène dans les camps de déplacés, responsable de l’épidémie de choléra qui a touché 2 768 personnes et en a tué 147 en 2006. Le taux de malnutrition globale se rapproche dangereusement du seuil d’urgence, tandis que soixante pour cent des familles qui ont besoin d’aide alimentaire mettent en cause l’insécurité comme obstacle majeur à la culture des champs, à l’élevage des bêtes et aux autres activités dont ils pourraient tirer un revenu.

La communauté humanitaire ne peut pas assurer indéfiniment la survie de la population au Darfour si l’insécurité perdure. Nous, membres de l’Équipe de pays des Nations Unies au Soudan, saluons les avancées réalisées par les signataires de l’Accord de paix au Darfour, dont le Gouvernement, ainsi que par les non signataires de cette accord, avancées qui vont vers une résolution du conflit au Darfour et le respect du droit humanitaire international et de ses principes.

Besoin de garantir la sécurité

Cependant, ces progrès doivent être consolidés. Il est urgent que la sécurité des civils et des travailleurs humanitaires soit garantie. D’autre part, les coupables des attaques, des violences, des enlèvements, des manœuvres d’intimidation, des vols et des blessures sur les civils, y compris sur les personnes déplacées, sur les travailleurs humanitaires et sur les autres non-combattants, doivent être punis. Sinon, les organismes humanitaires des Nations Unies et les ONG ne pourront plus maintenir leur position fragile qui, jusque là, a permis d’aider et de protéger quelque quatre millions de personnes affectées par le conflit sanglant du Darfour.