1,02 milliard de personnes sous-alimentées
L’augmentation la plus récente de ces chiffres n’est pas la conséquence de mauvaises récoltes. Elle a été précipitée par la crise économique mondiale qui a provoqué la baisse des revenus et la hausse du chômage, ce qui a réduit l’accès à la nourriture des personnes les plus démunies, a précisé l’agence des Nations Unies.
“La confluence du ralentissement économique et du maintien des prix élevés de l’alimentation dans de nombreux pays a poussé près de 100 millions de personnes de plus qu’en 2008 dans la faim chronique et la pauvreté” a expliqué Jacques Diouf, Directeur Général de la FAO. “Cette crise silencieuse – touchant un sixième de l’humanité – constitue un risque majeur pour le maintien de la sécurité et de la paix dans le monde. Nous devons établir un consensus sur l’éradication totale de la faim dans le monde et rapidement prendre les mesures nécessaires”.
“Nous ne pouvons pas rester indifférents face à l’état de l’insécurité alimentaire mondiale” a ajouté M. Diouf.
“Les pays les plus pauvres doivent recevoir les outils de politique de développement économique qui leur permettront d’accroître leur production et leur productivité agricole. L’investissement dans l’agriculture doit être renforcé dans la plupart des pays pauvres car un secteur agricole solide est primordial pour enrayer la pauvreté et la faim et pour constituer les bases de la croissance économique” a souligné Jacques Diouf.
“Les plus démunis sont principalement de petits exploitants agricoles dans les pays en développement. Ils ont le potentiel non seulement de subvenir à leurs propres besoins mais aussi de renforcer la sécurité alimentaire et faire redémarrer la croissance économique. Pour mettre en oeuvre ce potentiel et réduire le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde, les gouvernements, soutenus par la communauté internationale, doivent protéger leurs investissements dans l’agriculture. Ces mesures garantiront que les petits exploitants auront à la fois accès aux semences et aux engrais ainsi qu’aux technologies ciblées et bénéficieront de financements ruraux et d’accès aux marchés,” précise Kanayo F. Nwanze, président du Fond International pour le Développement Agricole (IFAD).
“Pour la plupart des pays en développement, il fait peu de doute qu’un soutien aux petites exploitations agricoles constitue la politique de protection sociale la plus durable, tout particulièrement dans une période de crise économique mondiale,” ajoute Kanayo E. Nwanze.
"La progression rapide de la faim représente une crise humanitaire urgente et majeure. Le monde doit agir pour subvenir aux besoins immédiats tout en mettant en place des solutions à long terme,” a déclaré Josette Sheeran, la Directrice Exécutive du Programme alimentaire mondial des Nations Unies.
L’avancée de la faim
Alors que de nombreux progrès ont été réalisés dans la lutte contre la faim au cours des années 80 et le début des années 90, elle s’est répandue au cours de la dernière décennie, selon la FAO. Le nombre de personnes sous-alimentées a augmenté entre 1995-97 et 2004-06 dans toutes les régions du monde sauf en Amérique Latine et dans les Caraïbes. Mais même dans ces régions, les efforts pour réduire la faim ont été ralentis à cause de la hausse des prix alimentaires et de la crise économique actuelle.
Cette année, principalement à cause de la crise économique mondiale, ajouté aux prix élevés de l’alimentation, le nombre de personnes malnutries augmentera de 11%, selon les estimations de la FAO. L’organisation s’est basée en partie sur les analyses du Ministère de l’agriculture américain.
La quasi-totalité des personnes sous-alimentées vivent dans les pays en développement. En Asie et dans le Pacifique, on enregistre environ 642 millions de personnes souffrant de malnutrition chronique, en Afrique Sub-Saharienne ce sont 265 millions de personnes; en Amérique Latine et dans les Caraïbes 53 millions; au Proche Orient et en Afrique du Nord, 42 millions et 15 millions de personnes dans les pays développés.
Au coeur de la crise
Les populations urbaines démunies seront face aux défis les plus sévères pour surmonter les effets de la récession mondiale. Elle se manifeste par la baisse des demandes d’exportation, un recul des investissements étrangers et la progression du chômage en zone urbaine. Les milieux ruraux ne seront pas épargnés pour autant. Des millions de migrants urbains vont devoir retourner dans leur région d’origine, créant une charge supplémentaire sur les pauvres en zones rurales.
Certains pays en développement doivent faire face aux réductions des renvois d’argent qui ont fortement chutés cette année, provoquant une perte de devises étrangères et une baisse des revenus ménagers. Cette réduction de renvois d’argent et le déclin probable de l’aide publique au développement limiteront la capacité des pays à réunir suffisamment de capitaux pour maintenir des systèmes de protection pour les plus pauvres.
Contrairement aux crises précédentes, les pays en développement ont moins de marge pour s’adapter à la détérioration économique, qui touche l’ensemble des régions du monde de façon plus ou moins simultanée. L’étendue des mesures prises pour remédier à ces chocs macro-économiques, tels la dépréciation du taux de change et les emprunts sur les marchés de capitaux étrangers par exemple, reste limitée dans un contexte de crise mondiale.
La crise économique fait suite à la crise des prix de la nourriture et du carburant de 2006-08. Alors que les prix alimentaires baissent sur les marchés mondiaux au cours des dernières années, les prix nationaux dans les pays en développement ont plus de mal à diminuer. Ils restent en moyenne 24% plus élevés fin 2008 comparé à 2006. Pour les consommateurs les plus pauvres, qui dépensent jusqu’à 60 % de leur revenu en nourriture de base, cela signifie une importante réduction de leur pouvoir d’achat. Toutefois, les prix des aliments de base sont toujours 24% plus élevés qu’en 2006 et 33 % de plus qu’en 2005.
Le rapport 2009 sur la faim (The State of Food Insecurity in the World, SOFI, en anglais) sera présenté en Octobre.
Faits et chiffres
Le nombre de personnes souffrant de la faim est passé de 825 millions en 1995-97, à 857 millions en 2000-02 et 873 millions en 2004-06.
Pour 2008, la FAO a revu ses chiffres à la baisse: grâce à une production alimentaire meilleure que prévue, le chiffre estimé est passé de 963 à 915 millions de personnes.
Les estimations de la FAO pour 2009 sont basées en partie sur les analyses du Ministère de l’Agriculture américain (USDA) et du service de recherche économique (ERS). Cette analyse conjointe ERS/USDA a examiné l’augmentation du nombre de personnes malnutries dans différentes régions suite à la crise économique mondiale de 2009.
En appliquant cette analyse aux chiffres de la FAO pour 2008 ce sont 100 millions de personnes qui vont rejoindre les rangs des personnes souffrant déjà de la faim, passant ainsi de 915 millions en 2008 à 1,02 milliard en 2009.