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Myanmar : Menace sur la culture du pavot

L’éradication de la culture du pavot est menacée au Myanmar. Sans stratégie à long terme de la part de la communauté internationale, on voit mal comment les fermiers de ce pays pourront délaisser la culture de la fleur de la mort pour d’autres productions qui leur permettront de se nourrir.

Eradiquer la culture du pavot

C’est en 1999 que le gouvernement du Myanmar prenait la décision d’éradiquer la culture du pavot sur son territoire. Il faut savoir que le Myanmar, un des pays les plus pauvres d’Asie du sud-est, était devenu à l’époque le deuxième plus grand producteur mondial d’opium et de son dérivé, l’héroïne, après l’Afghanistan. Triste record !

Le gouvernement a commencé à mettre en pratique sa politique d’éradication dans l’état du Shan qui a lui seul représentait 80% de la production d’opium du pays et fait partie de ce qui est convenu d’appeler le fameux triangle d’or de la production d’opium en Asie du sud-est. La culture du pavot est une tradition très ancienne dans ce territoire montagneux et reculé, situé à la frontière de la province chinoise Yunnan.

Source de revenu

des plus pauvres

C’est une activité qui représente la source de revenus principale pour les communautés. Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce ne sont pas les petits fermiers qui récoltent la manne engendrée par la culture du pavot, mais ces fameux « traders » qui se trouvent à l’extérieur du pays et qui engrangent 99% des profits.
Quoique fort maigres, la culture du pavot représente pour les petits fermiers du Myanmar une importante source de gains. Sur le revenu annuel de 214 dollars d’une famille cultivant le pavot, 133 dollars provenaient de la vente de l’opium en 2004.


Il n’est bien sûr pas question de mettre en doute la politique d’éradication du pavot.Bhim Udas

« Il n’est bien sûr pas question de mettre en doute la politique d’éradication du pavot, déclare le directeur du bureau du PAM au Myanmar, Bhim Udas. Au contraire ! Mais force est de constater que la communauté internationale a été et est toujours trop lente à mettre en place des politiques de développement de productions de cultures alternatives. En raison de cela, ces populations se sont dramatiquement appauvris au point de souffrir dangereusement d’insécurité alimentaire et de pousser le PAM à intervenir pour subvenir aux besoins des plus vulnérables ».

Plus de 347 000 personnes soutenues

Depuis 2003, le PAM a mis en place des programmes d’aide pour quelque 347 600 personnes dans les régions touchées par la politique d’éradication de l’opium. L’organisation soutient les familles les plus vulnérables.


Tant que la communauté internationale n’aura pas présenté des solutions alternatives et des perspectives de développement durables au Myanmar, l’interdiction actuelle va pousser de plus en plus de familles dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire Bhim Udas

« Tant que la communauté internationale n’aura pas présenté des solutions alternatives et des perspectives de développement durables au Myanmar, l’interdiction actuelle va pousser de plus en plus de familles dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire », estime Bhim Udas.
On estime à 400 000 le nombre de familles - soit deux millions de personnes - qui, privées de leur seule source de revenu, sans aucune alternative de substitution viable, ont été contraintes de réduire leur nombre de repas par jour, de substituer au riz des produits meilleur marché alors que d’autres ont dû vendre leurs biens et s’endetter pour s’acheter de la nourriture.

Une pauvreté croissante dans le Kokang

La situation alimentaire, en particulier dans la région du Kokang, est d’autant plus préoccupante que la dernière récolte de céréales a été très mauvaise en raison de la sécheresse. Aujourd’hui, un tiers de la population de Kokang a quitté la région à la recherche de revenus, laissant derrière elle, et sans soutien, les personnes âgées et les malades. L’accroissement de la pauvreté et le ralentissement économique général qui ont frappé la région a entraîné la fermeture de nombreuses cliniques, pharmacies et écoles. Le niveau de l’éducation en a considérable battis. En 2003, un an après l’entrée en vigueur de l’interdiction de la culture du pavot au Kokang, 6000 enfants quittaient l’école. Faute de moyens financiers, les parents trop pauvres ont été contraints de retirer leurs enfants des écoles.

Wa, un scénario similaire?

Un scénario similaire se profile à l’horizon pour la région de Wa qui va faire l’expérience de l’interdiction de la culture du pavot cette année. Les Nations Unies estiment à 400 000 le nombre de personnes qui seraient affectées par cette prohibition dont 100 000 qui risquent de ne plus avoir assez de nourriture en 2006.

La communauté internationale doit agir

« Si la communauté internationale ne propose pas rapidement des solutions de substitutions viables aux cultivateurs du pavot, la politique d’éradication de l’opium au Myanmar risque de se solder par un échec définitif », est convaincu Bhim Udas. Et ce serait dommage, car déjà la production d’opium a considérablement diminué dans ce pays. Elle a reculé de 73% en 2004 par rapport à son niveau record enregistré en 1996.